Arrivé à Tanger à l’automne 1871, Benjamin-Constant y réside presque sans interruption jusqu’au printemps 1873. Le peintre a loué une maison au chérif de Ouezanne afin de pouvoir vivre au plus près des habitants. Il aime par-dessus tout peindre depuis la kasbah, qui est le point culminant de la ville.
Notre tableau a été réalisé durant ce séjour, en 1872. Il y représente trois femmes se délassant sur la terrasse d’un palais tangérois. Une même rêverie les enrobe, et bien qu’elles soient ensemble, chacune semble perdue dans ses propres pensées. Elles tournent le dos à l’océan et à la ville qui s’étire en contre-bas du palais. A droite, adossée contre un mur blanchi à la chaux, une musicienne maure a laissé son tambourin près d’elle. L’instant est calme et silencieux.
Pour le confort des trois femmes, plusieurs tapis berbères aux motifs géométriques, des coussins en velours brodés et de grandes peaux de léopards ont été installés sur un large muret. Benjamin-Constant qui avait été fasciné par l’architecture arabo-mauresque lors de son premier voyage à Séville s’approprie la blancheur de la ville et son désir de voir un Orient vivant et réel. Il affirme en arrivant à Tanger « Voici la ville de mes rêves ! Lumière, blancheur, éclat – c’est bien l’Orient. C’est ce que j’ai tant désiré voir. »
Collection privée
« Du Maroc aux Indes, Voyages en Orient » par Lynne Thornton, éditions ACR, reproduit p.88