Jacques majorelle organise en mars 1934 au pavillon de la Mamounya à Rabat, une présentation de ses derniers tableaux. Les visiteurs découvrent surpris que le peintre des kasbahs est désormais le peintre des nus noirs. Cette nouvelle série d’oeuvres est d’un format plus grand que celui choisi pour ses tableaux de l’Atlas, et leur sensualité manifeste semble vouloir défier ceux qui lui ont reproché une certaine sécheresse dans ses réalisations précédentes. Avec des pauses faussement pudiques, ces corps d’ébène, de bronze et d’or ne dégagent une sensualité troublante. Mais ces somptueuses jeunes femmes noires, qui sont les descendantes des belles esclaves de la vallée du Souss et du Drâa et que les caravanes venant de Tombouctou ont ramenées du Niger, ne sont pour Jacques Majorelle que prétextes à peindre de beaux corps de femmes noires nues. Elles sont la personnification et la concrétisation de ses rêves de « cet Orient irréel que seuls les poètes connaissent et qui rarement s’offre à nos regards », comme il l’écrit à Etienne Cournault. Non sans une certaine malice, il donne à ses tableaux des titres évocateurs ‘Les amies ingénues’, ‘tendre amitié’ ou encore comme ici ‘La Sieste’.
Techniquement, dans cette nouvelle série de nus noirs, sa matière s’est encore allégée. Il utilise assez volontiers comme support de grands papiers parfois teintés, qu’il couvre de couleurs détrempées. Il les modèle ensuite en y ajoutant des couleurs vives qu’il pose à la brosse en les mêlant à des poudres métalliques (or, cuivre, argent) ou les appliquant par-dessus, nerveusement, avec ses doigts, pour leur donner un relief plus accidenté. Si les fonds sont parfois à peine esquissés, les personnages en revanche apparaissent extrêmement soignés et réalistes.
Certificat n°2021 V 10-2/4 du 10 mai 2021 par Amélie Marcilhac et Françoise Zafrani