Rudolf Ernst est sans conteste l’un des artistes français d’origine autrichienne les plus doués de sa génération avec Ludwig Deutsch. Fort d’une technique parfaite, il saisit avec une minutie remarquable chaque objet, chaque matière et chaque attitude dans des compositions toujours parfaitement construites.
Voici une scène où l’on surprend dans son riche intérieur un sultan à l’heure du thé. Confortablement installé sur une large peau de tigre et des coussins soyeux posés sur un tapis, il attend que le thé soit servi, tenant à la main sa longue pipe ottomane. Il porte sur sa tunique de soie verte un épais manteau d’intérieur en velours pourpre richement brodé et dont les manches repliées laissent entrevoir une doublure de soie mauve. Son turban blanc se détache des carreaux de faïence qui décorent les murs.
A travers les deux fenêtres, on devine la cour intérieure du palais. Une femme agenouillée auprès de lui verse le thé dans une tasse. Elle a déposé un plateau sur une table octogonale dont les incrustations de nacre font miroiter la lumière. L’instant est calme et posé. Rudolf Ernst apporte un soin tout particulier à la représentation des céramiques, art auquel il était très sensible et dont il avait acquis la technique auprès du maître verrier et céramiste français Léon Fargue au début des années 1890.